mercredi 2 juin 2010

D'Hommages

Moi aussi, j'hayiis ça les jeux de mots douteux comme titre. Ça fait tellement Coup de Pouce ou Enfants Québec. Mais je ne pouvais m'empêcher de ploguer celui-là. Parce qu'il y a eu du dommage depuis la dernière fois. Mon Grand-Pôpâ est décédé.

Foutue année de mes deux. MB en 2009, Grand-Pôpâ (GP), son père, cette année. Bon, faut dire que pour GP, c'est dans l'ordre des choses puisqu'à 80 ans, ton bout est fait surtout dans la maladie et la douleur, quasi quotidienne.

Toute la famille fût appellée quand on croyait qu'il était pour partir. Là, j'ai vraiment réalisé qu'il était pour mourrir, bientôt. J'ai pèté ma coche à la job, dans le vestiaire avant d'aller retrouver tout le monde. Franchement, je me rappelle pas avoir pleuré si fort. Il était à la maison dans sa pièce favorite, le salon. Il était encore conscient à ce moment. Assez pour me dire, quand je suis arrivé, que '' nous '' étions pour gagner ce soir-là (Le Canadien: Nous étions les deux seuls de la famille à prendre pour le CH: C'était le 7 eme match contre Pittsburgh) en me donnant trois GROSSES tapes sur la joue (il avait pas besoin de viser trop fort...). Quand je suis revenu le soir après le match, la dernière fois que je lui ai parlé consciemment, je lui ai dit qu'on avait gagné, les larmes aux yeux. J'aurais voulu lui dire que je l'aimais mais bon, vous savez, les hommes d'une autre époque...Puis en plus de ça, j'avais même pas les larmes aux yeux.

Je braillais comme un veau.

Le reste, c'est pas très jojo. C'est des soins palliatifs (lot quotidien de plusieurs personnes dans le domaine de la santé, que l'on béatifie tout-de-go) à la maison fournis par la famille, principalement ma grand-mère, ma mère et mes oncles. Et moi, mon frère et mes cousins, le peu de soulagement qu'on a pu apporter, eh bien, fut le bienvenu, je crois. En tout cas, on était là, tout le monde, jusqu'à la fin. Comme pour se dire que c'est pas rien que pour les fêtes qu'on est soudés (doués ?) mais aussi dans le deuil.

Voici ce que j'ai écrit et lu à l'église:

Hommage à Grand-Pôpâ

Ça aurait pu être un samedi comme tous les autres.

Il faisait beau, le fleuve était d’un bleu profond. Ça sentait le lilas dans le fond de la cour. Il y avait un geai bleu sur le toit du garage.

On serait arrivé chacun notre tour. Sans jamais sonner, sans jamais te déranger.

Ça sentait bon dans la maison parce que tu avais cuisiné un rôti de lard comme ta mère te l’avais enseigné. De dehors, on aurait entendu grand-môman chanter dans la maison.

Daniel serait arrivé en premier avec quelque chose à réparer. Benoit t’aurais appelé pour te jaser de choses et d’autres. Pierre serait arrivé avant midi, il t’aurait donné des nouvelles de la shop. Louise serait venue diner avec toi, vous auriez discuté de Foglia.

Après diner, t’aurais fait ton somme après avoir fini de lire ta Presse, la même que celle que tu allais chercher en courant avec ton frère Maurice quand ton père revenait du travail par le chemin de Sainte-Anne.

Après ton tour d’auto, pendant que tu regardais ton golf ou un match des Expos, un de tes petits-enfants aurait fait le gazon, sous ton œil attentif. Une des petites-filles serait passée te montrer son bulletin et tu l’aurais récompensée en feignant de ne pas te rappeler combien tu lui donnais de sous habituellement. Tu aurais pris dans tes bras un de tes arrières-petits-fils avec le sourire aux lèvres, les larmes aux yeux et la fierté dans le cœur.

Après souper, tu serais sorti arroser ton jardin. Tu te serais assis sur la galerie en regardant le St-Laurent, en songeant peut-être au temps où tu nageais jusqu’à la bouée pour ensuite revenir à la berge. Tu étais alors jeune et fringant et tu courtisais grand-môman.

Un autre de tes petits-fils serait arrivé pour écouter le hockey, vous seriez rentrés. Peut-être aurait-il eu droit à la fois où Ted Williams avait signé ton paquet de cigarette dans un ascenseur de Boston lors d’un voyage de Baseball avec tes amis dans ta belle Pontiac 54 marron et blanche. On l’a jamais vu parce que tu l’as jeté, saint-sacrecum !

T’aurais fait ta prière avant d’aller te coucher , comblé d’avoir vu tout ton monde.

Ça aurait pu être un samedi comme tous les autres. Tranquille, infini. Tu as choisi celui-là pour partir parce qu’au fond, tu savais que les mers de mai étaient passées. T’es parti la journée que l’été est arrivée.

Avec toi s’en va le pilier de nos vies, le point d’ancrage, ce qui nous définissait, nous liait tous ensemble.

T’es parti comme tu l’as souhaité, grand-pôpâ, après avoir vécu ta vie comme tu l’as voulue.


Je suis tellement fier d'avoir écrit ce texte pour mon GP et je suis si certain que MB aurait approuvé... Ça m'emplit le coeur d'un mélange de tristesse et d'accomplissement. Même si, au fond, je n'ai aucun mérite puisque je n'ai fait que décrire ce qu'était sa vie, dans toute sa splendeur et sa simplicité

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Y'a des jours où je suis si crevé que me couche il n'est même pas 9 heures. Y'a des jours où je suis si triste que je peux ruminer jusqu'à 4 heures du matin sans problèmes.

Des fois, je peux être une semaine sans lire autre chose que le cahier des sports de La Presse. Des semaines à penser à écrire sur mon blog, paralyser par l'action de le faire. Des jours à me dire que demain, je vais courrir. Des heures à penser que je devrais, au moins, m'informer sur la prochaine Coupe du Monde de foot.

D'autres fois, je me sens à ma place en jouant, couché sur l'asphalte, avec mon plus vieux. En tapotant les fesses de mon plus jeune pour le consoler. En embrassant ma blonde au comptoir de la cuisine. En arrosant mon jardin, le soir, quand le soleil se couche. En écoutant un cd-que-j'aime-pas-mais-que-je-vais-dire-que-j'aime-puisque-il-est-pas-connu-juste-pour-faire-à-part.

Des moments où ces disparus de ma vie prennent tellement d'importance dans leur absence que je sais plus quoi faire, j'en suis désemparé. Je ne peux plus leur parler, eux qui, en quelque sorte, régissaient mes pensées puisque je savais que c'était pour eux que ça s'adressait.

Puis je me dis que je connais aussi des gens qui sont bien vivants, qui combattent la maladie, qui luttent pour avoir deux minutes de répit dans leurs journées.

Je me dis que c'est de faire honneur autant aux morts qu'aux vifs que de continuer à écrire.

2 commentaires:

  1. Tu m'as fait pleurer mon ami. Une chance que j'etais pas a l'eglise, st-sacrecum!

    Grand d'hommage mais voila, vous etes un beau clan, vous le serez toujours malgre les pertes.

    Grosses bises

    Laulie

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